La pandémie de Covid-19 a provoqué une poussée mondiale de la digitalisation, en particulier dans le commerce de détail. Au début de la première vague, les consommateurs ont stocké des produits de base, notamment du papier toilette, et des denrées non périssables, par exemple des pâtes. Mais, quand ils ont compris que les restrictions de déplacement resteraient en place plus longtemps que prévu, ils ont changé de comportement et se sont rués sur le commerce en ligne (figure 1).
Figure 1 : Croissance de la vente en ligne par région en 2020
Source : eMarketer, Robeco, janvier 2021
Cette ruée s’explique en grande partie par le fait que de nouveaux consommateurs, souvent plus âgés, ont fini par sauter le pas et acheter sur Internet. Les plus de 65 ans sont ceux dont les dépenses en ligne ont le plus augmenté l’an passé aux États-Unis, selon NPD, une société spécialisée dans l’analyse des données1. La diversité des produits achetés en ligne a également augmenté. Selon une récente étude du cabinet d’audit et de conseil PwC, pas moins de 53 % des consommateurs mondiaux achètent désormais leurs vêtements « plus souvent ou toujours en ligne »2.
Autre catalyseur important du e-commerce : l’envolée de ce qui a été baptisé « commerce social », c’est-à-dire une forme de consommation essentiellement portée par les réseaux sociaux. En général, cela passe par des recommandations, des réductions, des jeux-concours, etc. Cette tendance est particulièrement notable en Chine, où la popularité croissante du commerce social a été démultipliée par l’explosion des achats groupés.
Ces évolutions de la consommation intervenues pendant la pandémie ne devraient pas disparaître avec la réouverture de l’économie et la levée des mesures de santé publique et des restrictions de déplacement. En effet, malgré le regain d’optimisme suscité par les progrès rapides des campagnes de vaccination, la sécurité reste une préoccupation majeure pour les clients. Seuls 59 % des consommateurs mondiaux disent se sentir en sécurité lorsqu’ils font du shopping dans des magasins physiques3, révèle une récente étude de Deloitte, un autre cabinet d’audit et de conseil.
Concurrence accrue et géants régionaux
Si la crise sanitaire a fortement accéléré la transformation numérique et propulsé le e-commerce vers de nouveaux sommets, elle a aussi dopé la concurrence. Au tout début de la pandémie, de nombreux magasins physiques traditionnels se sont soudainement retrouvés dos au mur et ont dû se convertir à la vente en ligne pour survivre à la crise. Ce faisant, ils sont venus concurrencer frontalement des spécialistes bien établis du e-commerce.
Signe clair d’une intensification de la concurrence dans ce secteur, des champions régionaux ont émergé. Si Amazon reste le leader incontesté au niveau mondial, ces géants locaux sont désormais aux avant-postes dans plusieurs pays. Il s’agit par exemple de MercadoLibre en Amérique latine ou de Shopee en Asie du Sud-Est. Alibaba domine en Chine mais certains concurrents agiles, dont JD.com et Pinduoduo, sont à ses trousses.
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La vente en ligne était à la traîne dans le commerce alimentaire, mais la pandémie a soudainement poussé les consommateurs à sauter le pas
Le e-commerce s’invite partout ou presque
Outre l’envolée générale du commerce et de la concurrence en ligne, un autre fait marquant est à signaler : l’arrivée du e-commerce dans des secteurs où il n’était quasiment pas présent avant la pandémie. Les magasins d’alimentation sont, de loin, l’exemple le plus frappant. La vente en ligne était à la traîne dans le commerce alimentaire, mais la pandémie a soudainement poussé les consommateurs à sauter le pas. Or c’est cette hésitation qui freinait son expansion internationale.
D’autres segments ont connu le même sort : les produits non essentiels, notamment les vêtements et accessoires de mode, les produits de beauté ou les équipements de sport ont, eux aussi, eu les faveurs des habitués des achats en ligne4. Les animaleries se sont elles aussi rapidement déplacées sur le web. Les spécialistes du e-commerce ont vu leur chiffre d’affaires s’envoler l’an passé, la demande en produits pour animaux et leurs parts de marché progressant.
Tendances de consommation
L’appétit des consommateurs évolue et votre portefeuille doit en faire autant
En savoir plus Voir tous les thèmesCourses en ligne et achats en magasin physique
Dans ce contexte, et compte tenu du potentiel d’économies, le rôle des magasins physiques a largement été remis en question. Mais ce qui semble se dessiner au sein du secteur de la distribution relève plus de l’évolution que de la disparition pure et simple des magasins physiques. Le e-commerce et la clientèle qu’il capte peu à peu ont beau faire les gros titres, les consommateurs continuent d’apprécier les relations humaines et les magasins physiques.
Enquête après enquête, ils affirment que la praticité d’un magasin de proximité reste un élément essentiel et que la vente en ligne ne remplacera pas totalement les boutiques « en dur ». De fait, des données de la plateforme de paiement Ayden montrent que les entreprises capables d’allier commerce physique et commerce en ligne s’en sont mieux sorties pendant la pandémie que celles qui n’étaient présentes que sur Internet5. L’avenir du commerce sera donc fait d’un mélange de courses en ligne et d’achats dans des magasins physiques.
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Même si la consommation actuelle traduit un certain manque de cohérence à cet égard, les acheteurs sont de plus en plus sensibles aux modes de consommation durables
Le rôle de plus en plus central de la durabilité
L’émergence d’entreprises comme Shopify témoigne aussi d’un autre phénomène : la montée en puissance des e-consommateurs en quête de produits sains, locaux et bons pour l’environnement. Même si la consommation actuelle traduit un certain manque de cohérence à cet égard, les acheteurs sont de plus en plus sensibles aux modes de consommation durables 6 (voir figure 2).
Figure 2 : Propension à acheter davantage de produits durables
Source : PwC Global Consumer Insights Pulse Survey, mars 2021. Question posée : « Êtes-vous d’accord ou pas d’accord avec les affirmations suivantes relatives à la durabilité des achats. » Verdict global : d’accord.
L’étude de PwC indique ainsi que 55 % des personnes interrogées sont prêtes à payer plus cher des aliments plus sains, et 50 % acceptent de le faire pour des produits locaux. Par ailleurs, 46 % accepteraient de payer plus cher un emballage écologique7. Élément intéressant : l’enquête révèle aussi une différence entre consommateurs en télétravail et consommateurs qui vont au bureau, les premiers étaient plus susceptibles de donner la priorité à la durabilité que les seconds.
Notes de bas de page
1Dans la distribution (alimentaire et autre), les clients de plus de 65 ans ont fait 15 % de leurs achats sur Internet entre janvier et octobre 2020, contre 10 % en 2019, selon des données NDP Checkout.
2Source : PwC Global Consumer Insights Pulse Survey, mars 2021.
3Source : Deloitte, Global State of the Consumer Tracker, données au 26 mai 2021.
4Source : PwC Global Consumer Insights Pulse Survey, mars 2021.
5Source : Adyen, 2020 Distribution report, octobre 2020.
6Voir par exemple : LE Europe, VVA Europe, Ipsos, ConPolicy et Trinomics, Behavioural Study on Consumers’ Engagement in the Circular Economy, rapport pour la Commission européenne, octobre 2018.
7Source : PwC Global Consumer Insights Pulse Survey, mars 2021.
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